mercredi 31 octobre 2012

Do not go gentle into that good night

Dylan Thomas

Do not go gentle into that good night,
Old age should burn and rave at close of day;
Rage, rage against the dying of the light.

Though wise men at their end know dark is right,
Because their words have caused no lightening they
Do not go gentle into that good night.

Good men, the last wave by, crying how bright
Their frail deeds might have danced in a green bay
Rage, rage against the dying of the light.

Wild men who caught and sang the sun in flight
And learn, too late, they grieved it on its way,
Do not go gentle into that good night.

Grave men, near death, who see with blinding sight
Blind eyes could blaze like meteors and be gay,
Rage, rage against the dying of the light.

And you, my father, there on the sad height,
Curse, bless me now with your fierce tears, I pray.
Do not go gentle into that good night,
Rage, rage against the dying of the light.

L'ennemi

Je ne sais pas exactement où se loge l'ennemi. Tantôt il semble être là, puis ensuite il se fait oublier, pendant un bon moment. Et alors que je me crois en toute sécurité, de nouveau il attaque, subrepticement, d'un angle toujours imprévisible. Et je me fais à chaque fois surprendre.

Je ne sais pas pourquoi c'est devenu un jour mon ennemi. Et qui est-il au fond? Tout cela est assez obscur pour moi. Je cherche des explications: "ai-je fait trop ceci, ou trop cela? J'aurais dû, je n'aurais pas dû..." et ainsi de suite. Mais le propre de cet adversaire, c'est qu'il ne donne jamais de réponse, il ne se perd pas en paroles. Il agit, il ajuste sa cible et puis il avance ainsi, en silence, efficace et redoutable. 

Donc cet ennemi, il est. Tout simplement. Il n'y a pas à négocier. Toute révolte est inutile, elle n'y peut rien contre son existence. J'ai pourtant essayé : doucement d'abord, comme si je voulais l'apprivoiser. Puis j'ai voulu négocier et encore plus tard j'ai pleuré, j'ai tapé du pied pour marquer ouvertement mon désaccord. Mais tout cela fut vain. Aucune réponse, juste des tirs toujours aussi ciblés, en plein dans le mille. J'ai beau me cacher entre les murs de ma fortification - je suis à chaque fois atteinte par les coups du franc-tireur.

D'ailleurs, mon corps commence à en porter les marques. Je trébuche plus facilement avec tous ces impacts, je chancelle et je tombe. Puis il suffit que je me regarde dans le miroir pour en reconnaître les ravages. C'est un ennemi qui n'est pas pressé de m'achever tout de suite, il a tout son temps, il s'y prend avec justesse, avec délicatesse même. C'est le propre d'un tireur d'élite, cela me semble être clair maintenant. 

Ce qui est étonnant, c'est que l'on peut s'habituer à sa présence masquée. Alors que, au fond de moi-même, je suis en révolte, je commence malgré moi à composer avec lui. Puisqu'il est là en cachette, cet adversaire, puisqu'il ne se laisse pas déloger, eh bien, la pure propension à l'habitude fait que, de facto, j'accepte son existence. Un double mouvement donc d'indignation et de résignation... c'est véritablement étonnant.

Néanmoins, à chaque fois que les tirs atteignent leur cible - et donc moi - il est évident que la pensée de la mort se rapproche. Mes fortifications étant d'ailleurs de plus en plus fragiles, il me semble tout à fait normal que je réfléchisse à l'issue de cette lutte inégale. Quand je sens l'impact d'un nouveau tir, quand j'en éprouve toute la douleur, la mort m'apparaît comme un aboutissement tout à fait souhaitable. Pouvoir enfin me dire que le combat est terminé, me rendre aux mains de l'ennemi, cela à au moins le mérite de la certitude quant à la fin de la souffrance. Enfin, c'est ce que j'imagine car, au fond, rien n'est moins sûr. Je ne connais pas l'état d'esprit de mon adversaire. Peut-être - et c'est même probable - ne fait-il jamais de prisonniers. Il les exécute de façon plus ou moins cruelle.  Va savoir! Au fond de moi, je ne suis pas pressée de connaître l'issue finale du combat. Car il y a toujours l'espoir d'une possible reddition de sa part, sinon définitive, au moins temporaire.

En attendant, et en espérant donc, je m'aménage certains couloirs de sûreté au sein même de ma fortification. On devient assez rusé pour se soustraire, pendant un court moment au moins, à la vigilance de l'ennemi. Puis on découvre tout à coup, au détour d'un coin, au milieu de la solitude, un compagnon d'infortune avec lequel on peut échanger, qui donne des conseils, partage sa vision de la situation globale, de son expérience personnelle. Ces moments-là sont inestimables. Un vrai bonheur au milieu du champ de bataille. Puis il y a les alliés qui sont là, bien que leur position exacte reste souvent voilée pour moi qui suis dans un poste avancé. Néanmoins, et même si ces alliés ne pourront jamais véritablement comprendre ce que je vis, ici, il faut avoir confiance.  Voilà ce que je me dis, alors que la confiance, c'est une entreprise fragile, et toujours à reconstruire. 

Somme toute, c'est assez étonnant ce que l'on peut endurer. Nous sommes entourés d'ennemis et d'alliés, sans oublier les cohortes d'indifférents. Notre réalité extérieure est façonnée grosso modo par les bons et les méchants, le bien et le mal. Entre les contraintes qui s'imposent ainsi à notre monde physique, il reste néanmoins - et heureusement - la liberté de pensée. Pour transformer en nuances subtiles les affrontements manichéens. Pour en faire quelque chose d'intelligent, pour exprimer l'impensé, pour faire vivre l'esprit. C'est cet acte de création qui fait véritablement de nous ce que nous sommes: des êtres humains.

dimanche 28 octobre 2012

Ombre impitoyable





Je n'aurais aucun moyen
De savoir ce qui est
Si ce n'était que le soleil
Projette mon ombre
Sur la terre et les herbes
Qui attendent - comme moi -
Les fines pétales de givre
Les enveloppant pour toujours.