vendredi 27 mai 2011

C bô !

... un cytomégalovirus (le virus du baiser)

N'empêche que ce salopard m'a foutu dedans depuis 7 semaines maintenant. Suite logique d'une histoire d'amour triste...
Je reviens et je pète tout !
D'ailleurs, avec un nom pareil, faut pas s'étonner de prendre des buts à la fin ! Cytomégalovirus, mon oeil !



Encore une maladie que mon frangin va découvrir "grâce" à moi et dont la conscience va faire qu'elle devient "attrapable" pour lui. Mais non, ptit loup mon frérot, tu n'es pas cablé comme moi ! Le corps qui prend le relais du psychisme souffrant de trop, c'est ma spécialité - et je m'en occupe sérieusement.

mercredi 25 mai 2011

La B.A.

... d'une groooosse conne

Il se trouve que je suis clouée sur un lit d'hôpital, avec une fièvre de cheval inexpliquée. Il se trouve aussi que j'ai une petite voisine martiniquaise qui souffre l'enfer - et que moi aux premières loges de sa souffrance, je ne peux que compatir, tout en essayant de m'en protéger au mieux.

C'est de toutes façons ça, l'hôpital, depuis que je suis arrivée aux urgences : une espèce de Cour des miracles, avec des p'tits vieux qui regardent d'une manière totalement hébétée, ne comprenant plus le monde et ce qui leur arrive. Des vielles édentées à la peau diaphane, respirant juste ce qu'il faut pour survivre encore un peu. Des plus jeunes, plus vigoureux face à la gangrène de la maladie qui finit par avoir raison de la vie. Il y en a un en particulier, je pense d'abord qu'il est en train de téléphoner pour résoudre quelque problème compliqué où il ne trouve pas le bon interlocuteur. Or, je me rends compte qu'il mène à lui tout seul un dialogue imaginaire, musclé, pour ne pas dire grossier, avec un destin qui s'acharne, kafkaïen, contre lui. Malgré l'appel au calme des infirmiers et brancardiers, rien n'y fait, il ne se calmera pas, eh ben non quoi - et merde encore!!!

Il se trouve aussi que la misère humaine attire toujours tout un tas d'individus suspects qui aiment s'en repaître. En l'occurrence, ce matin-là, une dame au pantalon façon "golf" et au t-shirt col remonté comme il se doit dans la bonne société versaillaise, entre avec entrain dans la chambre où je suis, avec ma voisine qui gémit, pète et pisse comme elle peut. La dame arbore un badge "l'autorisant à" je ne sais quoi, mais en tout cas, elle prend l'air autorisée, de plus haute instance.

"Bonjour Mesdames, je suis visiteuse d'hôpital - oh, je vois que vous travaillez ?!" lance-t-elle en un seul souffle. Je ne dis rien, je n'ai rien demandé, et du coup, elle va voir ma petite voisine.
"Bonjour Madame, je suis visiteuse d'hôpital, je viens vous écouter, vous êtes là depuis quand? Et vous avez quoi comme maladie?" Ma voisine est quelque peu désemparée devant l'énergie déterminée de cette quinquagénaire. Pourtant, elle répond gentiment. "Vous êtes mariée? Vous avez des enfants? C'est dur votre maladie? Vous arrivez à travailler?" Toujours le flot de questions qui s'abat sur la pauvre voisine qui n'a rien demandé non plus, tout comme moi. A peine a-t-elle répondu avec un mot, la bourge proprette repart revigourée par la réponse, pour lancer un autre assaut de questions. Mais bon, faut pas trop traîner non plus, car il y a comme ça tout un hôpital à "faire" - donc l'intérêt de la Versaillaise tombe vite. 

Elle se tourne vers moi, estimant que ma voisine ne peut plus rien lui apprendre d'intéressant. Mais elle est un peu hésitante, vu que je lui adresse carrément des regards hostiles. Même scénario, pourtant : "Vous êtes là depuis longtemps? Arrivée par les urgences?" Et là, elle se lance - les yeux pleins d'espoir d'en avoir peut-être pour son compte - dans ce qui la disqualifiera définitivement : "Ca doit être beaucoup d'émotions, non?" Mon regard est noir, je continue à bosser sur mon ordi pendant que je lui lance "je gère, Madame, je gère". Du coup, elle se casse enfin, ouff, c'est fini tant pour moi que pour elle, et elle peut continuer sa charité dont elle fera certainement part à ses congénères, lors du prochain déjeuner bridge. Et elle aura très certainement aussi une pensée émue pour elle-même le Dimanche suivant, à l'heure de la Messe, lorsqu'il s'agira de faire l'inventaire de toutes les bonnes actions de la semaine.

Ce que je regrette, moi, c'est de ne pas lui avoir dit que sa façon de faire intrusion dans la vie des gens en grande fragilité, c'est de l'ordre de l'irresponsabilité la plus totale. Qu'une alliance entre un écoutant et un écouté est une chose éminemment fragile qui se tisse tout tout doucement, dans le calme et la confiance. Et que, a contrario, elle n'a même pas pris la peine de demander l'autorisation de poser des questions. Que sa façon de feindre à la fois l'intérêt tout en montrant son empressement d'en finir avec un patient donné, relève du cynisme complet. Et lorsqu'on incite les gens à ouvrir leur coeur en leur posant des questions sur leurs émotions, là faut être à la fois clair sur ses propres motivations à avancer sur ce terrain, et certain de pouvoir accueillir ce qui risque de venir.

Le pire, justement, et cela restera certainement inaccessible à jamais à cette pauvre débile, c'est quelle adore, au fond, entendre ces récits tout en se croyant à l'abri, elle. Voir ces malades en détresse, voir les gens alités dans leur pauvre humanité misérable et sale, et elle du bon côté, debout, propre sur elle, "in control" - voilà qui la fait véritablement jouir, au plus profond de son psychisme malade.

mardi 3 mai 2011

Haute Montagne : Aiguille du Midi, Tour Ronde

Des bavantes sous le regard du Mont Blanc

Faut être un peu gonflée, tout de même, pour débarquer de Paris la veille et le lendemain grimper à l'Aiguille du Midi. Il est vrai que j'ai cette croyance que j'arrive à faire ce à quoi d'autres ne parviendraient pas. Mais, pour ce coup-là, je vais payer mon complexe de supériorité par 7 semaines de fièvre, sauf que je ne le sais pas encore.

Mon guide me propose la voie Baquet Rébuffat (TD+) et qu'à cela ne tienne, on s'y lance, vers 13h00, une fois débarqués du téléphérique et descendus à ski au pied de la voie. Le granit sous le soleil de ce mois d'avril a gardé la chaleur, le toucher du rocher est extra, et la voie se dissine avec une grande pureté. Je ne me rends pas franchement compte de l'altitude, sauf que les avant-bras se mettent en position "bouteilles" très rapidement. Ce Rébuffat, même s'il est monté ici avec des échelles et autre matériel artificiel, ce fut quand-même un mec hallucinant d'audace et de compétence ! La voie est technique, athlétique et très belle, impressionnante par moments, et le dièdre en L7 m'achève presque définitivement car la seule fissure qui aurait permis d'offrir quelque prise est pleine de glace. Je parviens à m'y hisser (comment ont-ils fait il y a 60 ans ???) avec moult treuillage de la part du guide. D'ailleurs, ce sera la dernière longueur que nous pourrons faire dans la voie (il en reste deux faciles) car la neige est trop abondante et il faudrait avoir avec nous les grosses chaussures.

D'ailleurs c'est là aussi qu'on se rend compte qu'on est à près de 4000 m d'altitude : à peine le soleil faiblit-il, un froid intense et profond s'empare de moi malgré ma doudoune. Clair que c'est du sérieux ici, on arrête de jouer : au moindre problème (temps, matos insuffisant ou perdu, difficulté du rocher qui ralentit), on est très vite dans la très grosse merde... Nous descendons donc en rappel - je suis toujours aussi contente de ne pas m'y lancer en première, tellement cela continue à m'impressionner. De nouveau en bas, près du dépôt, nous rechaussons nos skis et repartons pour le refuge des Cosmiques.
On arrive à point car on y sert le dîner. Génial, ce confort dans cet environnement austère et néanmoins beau. J'ai le privilège de pouvoir dormir dans un dortoirs où il n'y a que très peu de monde, avec vue sur le soleil couchant qui illumine le sommet du Mont-Blanc de sa lumière rose-orangée, et je me dis que c'est vraiment royal.

Sauf que c'est là que les emmerdements commencent. Au milieu de la nuit, à trois heures (03.00, et oui), le réveil sonne car en circonstances normales, nous devrions repartir. Mais moi, j'ai subitement pris 30 ans pendant la nuit, que dis-je : 50 ! Je frissonne, je grelotte, j'ai un mal de crâne abo, et je monte les trois étages pour aller pisser comme une petite vieille proche d'une syncope. Impossible à démarrer la machine, je me sens littéralement malade, bien au-delà de ce qu'on ma dit allait provoquer l'altitude. Le guide est passablement hs aussi et on décide donc, la mort dans l'âme, de renoncer, au vu de mon état. On se recouche jusqu'à 7h00 en espérant que ça ira mieux. Mais 7h00, rien n'y fait, je suis toujours aussi hs, je n'avale pas un morceau, je grelotte et du coup, on décide de descendre tout doucement la Vallée Blanche, on renonçant définitivement à l'ascension de la face Nord de la Tour Ronde (3792m).

Peu à peu - et après coup je me demande comment j'ai fait - je reprends du poil de la bête sous l'effet de l'air frais, au point où j'arrive à skier presque normalement. Du coup, encouragés, on met les peaux pour s'approcher du pied de la paraoi. Là encore, ça va plutôt mieux et hop, on est partis dans la face nord! Nous avançons vite même si, à partir du resserrement du couloir au milieu qui est en glace vive, je suis complètement au taquet. C'est vraiment très physique tout cela, et quand on lit les différents commentaires sur blogs, ça a toujours l'air d'un rien... "pas engagé", "à faire et à refaire", comme si on était sur une promenade au bord de la plage. Eh ben non, il y a de longs passages où l'on ne peut pas assurer et si la cordée tombe, elle appartient au diable, c'est du certain. La dernière traversée sur glace vive est délicate, et au vu de la fatigue, mes piolets ne s'y plantent plus qu'approximativement. Heureusement je suis encordée !

Une fois sur la crête, je n'ai pas fini puisqu'il faut contourner le rocher sommital et en faire l'ascension. Tout cela en chaussures à ski et avec les crampons. Je commence à pester, signe comme quoi j'en chie un max. D'un autre côté, abandonner n'est pas un mot que je connais tant que je tiens debout. On continue donc, bien entendu, il n'y a pas le choix, et puis je l'ai tellement voulue, cette face Nord! Parfois aussi, les distances paraissent interminables, mais au fond, il n'y a plus que pour quelques minutes. C'est exactement ce qui se passe : alors que j'ai les premières larmes qui me montent aux yeux, je suis sur le sommet, ni vu, ni connu ! Une belle Madonne Noire le marque et on se claque la bise avec la guide (qui commence à bien me connaître et qui sait tempérer ;o)

A peine assis, nous voilà repartis, car nous avons somme toute 4 heures de retard sur le planning prévu initialement. Et il faut redescendre toute la Vallée Blanche pour essayer d'attraper la dernière beine de la journée qui part de Montenvers à Chamonix.

Je la fais courte, mais la dernière beine, nour l'aurions eue avec une avance d'exactement 2 min 16 secondes - si elle n'était pas déjà arrêtée depuis une demie-heure !! Donc, remontée à partir du glacier jusqu'à la station Montenvers, où de sombres cons ont fermé les chiottes afin que personne ne puisse boire un coup d'eau sans payer les restaurateurs (fermés par ailleurs). J'ai la haine car nous crêvons tous les deux de soif. Le chemin pour redescendre à Chamonix a aussi été tracé tout spécialement pour les handicapés moteurs semble-t-il, puisqu'il descend avec une inclinaison d'environ 2%. C'est in-ter-mi-na-ble !!! Le guide ne dit plus rien (il porte tout le matos !!!) et moi non plus. La soif est lancinante. Nous nous approchons tout doucement de Chamonix ou enfin ! boire devient possible. On est peu finalement - et revenir aux bases du fonctionnement physique apporte une dimension à l'existence de la meuf postmoderne que je suis qui me semble être inestimable.

Encore que - les deux bavantes furent les mesures initiales d'un épuisement qui me procurera un virus pendant 7 semaines. On naît postmoderne et on le reste !